Cour d’appel de Versailles
9 novembre 2020
Ordonnance N°329

 

Si l’article L 3211-11 du code de la santé publique prévoit qu’un certificat médical circonstancié peut prendre la forme d’un avis établi sur la base du dossier médical du patient, tel n’est pas le cas de l’article L 3211-2-2 qui exige qu’un médecin ait examiné le patient ; en conséquence, ce dernier doit obligatoirement être présent lors de l’examen.

Le 14 octobre 2020, le Préfet des Hauts-de-Seine a ordonné l’admission en soins psychiatriques de Monsieur X.

Le 15 octobre 2020, un médecin de l’hôpital où cette personne est habituellement soignée a établi le certificat prévu à l’article L 3211-2-2 du code de la santé publique (CSP) et a conclu que l’état mental du patient imposait la poursuite des soins.

Or, ce médecin a expressément mentionné dans son certificat médical que le patient en question n’était pas physiquement présent dans le service lorsqu’il a certifié l’avoir examiné.

Par la suite, un autre médecin a établi un « avis médical dit de 72 heures », dans lequel il indiquait que l’état du patient imposait également la poursuite des soins et la prolongation de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète.

Or, de la même manière, ce médecin précisait que le patient n’était pas physiquement présent au moment où il a procédé à cet examen.

Par arrêté du 20 octobre 2020, le Préfet des Hauts-de-Seine a décidé que les soins psychiatriques du patient devaient se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète.

Le Préfet a ensuite saisi le juge des libertés et de la détention (JLD) aux fins de poursuite de l’hospitalisation de l’intéressé.

Dans l’avis motivé accompagnant la saisine du JLD, daté du 20 octobre 2020 à 16 h 50, un médecin de l’hôpital a indiqué que le patient avait été réintégré administrativement mais qu’il était physiquement absent du service. (Celui-ci ne réintégrera le service de psychiatrie de l’hôpital que le 21 octobre 2020 à 11 h 15).

Par une ordonnance N°20/1203 du 23 octobre 2020, le JLD du tribunal judiciaire de NANTERRE a fait droit à la requête du Préfet. Il a aussitôt été fait appel de cette ordonnance devant le Premier Président de la Cour d’appel de VERSAILLES.

Devant le juge d’appel, il a été rappelé qu’il n’était pas contesté que le patient n’était pas présent à l’hôpital au moment où les certificats médicaux de 24 heures et de 72 heures avaient été signés.

Il a été souligné qu’aux termes de l’article L 3211-2-2 du CSP, un médecin aurait dû réaliser un « examen somatique complet » du patient.

Il a ensuite été précisé ce que la Haute autorité de santé entend par « examen somatique » :

 « D – Examen somatique complet

 L’examen somatique complet est cité à l’article L. 3211-2-2 du Code de la santé publique […] il doit au moins comporter la mesure des paramètres suivants :

  • vigilance ;
  • pression artérielle ;
  • pouls ;
  • température ;
  • fréquence respiratoire ;
  • glycémie capillaire.

 En cas d’agitation, la mesure de la SpO2 (oxymétrie de pouls) est recommandée dès que possible. »[1]

Ainsi, en l’absence du patient, il était impossible de réaliser l’examen prescrit par l’article
L 3211-2-2 du CSP. La procédure était donc irrégulière et la mainlevée de la mesure d’hospitalisation devait être ordonnée.

C’est bien ce qu’a finalement jugé la Cour d’appel de VERSAILLES :

« Les certificats médicaux établis par le docteur […] et par le docteur […] ont été établis sans examen de M. et par conséquent ne remplissent pas les conditions posées par L.3211-2-2 du code de la santé publique.

Ces manquements font nécessairement grief à M. dès lors qu’il s’est trouvé sous le coup d’une hospitalisation complète sous contrainte […] alors que son état n’avait pas fait l’objet d’une évaluation médicale en étant, pour le moins, examiné par deux médecins dans le délai de 72 heures après la décision initiale d’hospitalisation complète sous contrainte.

Il y a donc lieu d’accueillir le moyen soulevé par le conseil de M ., d’infirmer l’ordonnance dont appel sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens et de donner mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète sous contrainte. »

[1] Fiche MEMO établie par la Haute autorité de santé intitulée : « Aide à la rédaction des certificats et avis médicaux dans le cadre des soins psychiatriques sans consentement d’une personne majeure à l’issue de la période d’observation de 72 heures » – HAS / Service des bonnes pratiques professionnelles / mars 2018 – p.36 et 37.