TA Cergy-Pontoise,
23 juin 2023
Décision N°2203495

2014 : Madame X voit sa demande de logement reconnue prioritaire – 2015 : le tribunal enjoint au Préfet de lui faire une proposition de logement – 2017 : le tribunal condamne le Préfet à réparer le préjudice que sa carence a causé – 2018 : le cabinet LUNEAU Avocat saisit la DRIHL – 2019 : il saisit la DDFIP, puis de nouveau le tribunal administratif – 2021 : le tribunal classe le dossier ; le cabinet demande l’ouverture d’une procédure juridictionnelle – 2023 : le tribunal condamne à nouveau l’Etat. A quand l’exécution effective des condamnations… ?!

Madame X a formé un recours devant la commission de médiation du département des Hauts-de-Seine pour obtenir une offre de logement. Sa demande a été reconnue prioritaire par décision du 10 septembre 2014.

N’ayant reçu aucune proposition de logement, Madame X a formé un recours en injonction devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, demandant qu’il soit enjoint au Préfet d’exécuter la décision du 10 septembre 2014. Par jugement du 15 juillet 2015, le tribunal a fait droit à la requête mais le Préfet des Hauts-de-Seine n’a pas davantage fait de proposition de logement à Madame X.

La double carence de l’Etat qui, d’une part n’a pas satisfait à l’obligation de reloger Madame X et sa famille, et d’autre part n’a pas exécuté le jugement du 15 juillet 2015, est la cause de son préjudice.

Par lettre du 17 octobre 2015 Madame X demande au Préfet des Hauts-de-Seine que ce préjudice lui soit réparé. Aucune réponse ne lui ayant été adressée, elle saisit le tribunal administratif pour faire valoir ses droits.

Pendant plusieurs années, Madame X doit rester dans son logement de 32 m² avec son mari et leurs sept enfants. La promiscuité dans laquelle ils vivent est extrêmement pénible, eu égard notamment à l’âge de leurs enfants (entre 4 et 21 ans).

A la date de la requête indemnitaire, les troubles dans leurs conditions d’existence sont particulièrement importants. Tous les enfants sont obligés de partager leurs lits : leurs deux fils de 21 et 14 ans partagent un canapé-lit, tandis que leurs filles de 13 et 10 ans et de 20 et 15 ans dorment dans des lits superposés ; la petite dernière, âgée de 4 ans, dormant quant à elle dans le lit conjugal.

Par jugement du 20 octobre 2017, le tribunal administratif condamne l’Etat à payer à Madame X la somme de 8 000 euros en réparation de son préjudice, ainsi que 750 euros sur le fondement de l’article L 761-1 du code de justice administrative.

C’est alors qu’un véritable parcours du combattant va commencer pour obtenir l’exécution complète du jugement.

Par lettre recommandée du 19 septembre 2018, le cabinet LUNEAU Avocat demande à la direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (DRIHL) d’exécuter la décision du tribunal, sans jamais recevoir de réponse.

Par lettre recommandée du 10 avril 2019, le cabinet demande à la Direction départementale des finances publiques (DDFIP) de procéder au payement de la créance de Madame X, augmenté des intérêts au taux légal, sans plus de succès.

Aucun versement n’ayant été effectué, le cabinet saisit de nouveau le tribunal administratif par lettre recommandée du 7 juin 2019.

Le 4 septembre 2019, la DDFIP du Val-de-Marne procède enfin à un virement d’un montant de 8 750 € sur le compte bancaire de Madame X.

Par lettre du 24 novembre 2021, le tribunal informe le cabinet du classement administratif de la demande d’exécution du jugement du 20 octobre 2017.

Or, aux termes de ce jugement, « Madame X a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 8 000 euros à compter du 20 octobre 2015, date de réception de sa réclamation indemnitaire par le préfet des Hauts-de-Seine ».

La somme correspondant à ces intérêts n’ayant pas été versée, le cabinet demande au tribunal de bien vouloir ouvrir une procédure juridictionnelle de sorte que le jugement du 20 octobre 2017 puisse être enfin exécuté dans son intégralité.

Par lettre du 10 mars 2022, le cabinet reçoit une ordonnance du 2 mars 2022 ouvrant une procédure juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d’exécution du jugement du 20 octobre 2017.

Il est alors demandé de bien vouloir :

  • condamner l’Etat, sous astreinte de 50 € par jour de retard, à verser à Madame X les intérêts auxquels elle a droit ;
  • condamner l’Etat au versement d’une somme de 750 euros en application de l’article
    L 761-1 du code de justice administrative, compte-tenu de la multiplication des démarches que Madame X a été contrainte d’effectuer pour faire valoir ses droits dans son intégralité.

Ce n’est que le 23 juin 2023 que le tribunal administratif rend une décision faisant droit à toutes les demandes du cabinet LUNEAU Avocat. Les pièces nécessaires à l’exécution de la décision sont aussitôt transmises à la DRHIL en espérant qu’il ne faille pas plusieurs années pour faire exécuter une décision condamnant l’Etat pour ne pas avoir pleinement exécuté une précédente décision le condamnant à des dommages-intérêts, pour ne pas avoir appliqué une ordonnance lui enjoignant de proposer un logement à Madame X !