Tribunal judiciaire de Nanterre
6 avril 2021 – N° de parquet 20120000001

Lorsqu’au cours d’une garde à vue, un expert psychiatre conclut à l’absence de troubles psychiques ou neuropsychiques du mis en cause mais que ce dernier est hospitalisé contre sa volonté dans un établissement psychiatrique moins de deux semaines après les faits, une contre-expertise apparaît nécessaire pour déterminer s’il existe une cause faisant obstacle à la responsabilité pénale du prévenu.

Le prévenu a été placé en garde à vue en avril 2020 pour des menaces de mort réitérées et des troubles contre la tranquillité d’autrui par agressions sonores.

Le même jour, une expertise psychiatrique a été ordonnée. Elle a pris la forme d’un entretien d’une vingtaine de minutes menée par un psychiatre qui a conclu que le prévenu ne présentait aucun trouble psychique ayant aboli ou même simplement altéré son discernement.

Le psychiatre précisait en outre que le prévenu ne risquait pas de compromettre l’ordre public et la sûreté des personnes et que son état ne nécessitait pas d’hospitalisation en milieu spécialisé. Or, ces conclusions ont été contredites par l’hospitalisation de l’intéressé, moins de deux semaines après sa garde à vue, au sein d’une unité de soins psychiatriques.

Cette hospitalisation a été décidée par le Préfet sur le fondement d’un certificat médical mentionnant que « les troubles mentaux de [Monsieur X] nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public et rendent nécessaire son admission en soins psychiatriques ».

Monsieur X était resté plus d’un mois dans l’établissement psychiatrique où il avait été admis, pour n’en ressortir qu’en juin 2020 avec un traitement lourd à suivre sur une longue durée. Dans ces conditions, le cabinet Luneau avocat, qui assiste le prévenu, a demandé qu’il soit ordonné une contre-expertise psychiatrique afin d’évaluer l’existence d’une cause d’irresponsabilité pénale.

Malgré l’opposition de la partie civile et du procureur de la République, le vice-président du tribunal correctionnel a décidé de faire droit à cette demande pour deux motifs :

  • d’une part, parce que les certificats médicaux produits aux débats renfermaient des indications précises sur l’état mental du mis en cause, les symptômes de sa maladie et de son évolution et,
  • d’autre part, en raison de la proximité entre la date de son hospitalisation et celle de la dernière plainte de la partie civile.

Une nouvelle expertise a donc été ordonnée et l’examen au fond de l’affaire a été renvoyé au 14 décembre 2021 (voir ci-après le commentaire de la décision rendue).