JLD Nanterre,
8 avril 2022
Ordonnance N°22/554
Lorsqu’une personne est hospitalisée à la demande d’un tiers en urgence, elle doit être examinée par deux psychiatres distincts dans les 72 h suivant son hospitalisation.
La violation de cette obligation constitue une irrégularité portant nécessairement atteinte aux droits du patient. Elle doit donc entraîner la mainlevée de son hospitalisation.
En application de l’article L 3212-1 du code de la santé publique (CSP), une personne peut être hospitalisée contre sa volonté lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante justifiant son hospitalisation.
Un tiers, ayant qualité pour agir, peut demander l’hospitalisation d’une personne présentant de tels troubles. La décision d’admission, qui sera prise par le directeur d’un établissement psychiatrique habilité, doit être accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours attestant que les conditions prévues par le CSP sont bien réunies.
Après l’admission à l’hôpital commence une période d’observation, au cours de laquelle deux certificats médicaux, établis dans les 24 heures puis dans les 72 heures de l’admission, doivent constater l’état mental du patient et confirmer ou non la nécessité de maintenir les soins psychiatriques (article L 3211-2-2 du CSP).
Ces certificats peuvent être établis par le même psychiatre. Toutefois, il existe une exception lorsque la personne souffrant de troubles psychiques a été admise en urgence, c’est-à-dire sur le fondement de l’article L 3212-3 du CSP. Dans ce cas de figure, la décision d’admission à l’hôpital psychiatrique est prise sur le fondement d’un seul certificat médical.
Afin de préserver le droit fondamental selon lequel nul ne peut être arbitrairement privé de liberté, le législateur a prévu que, dans cette hypothèse, le maintien de l’hospitalisation contre le consentement de l’intéressé ne peut être décidé qu’après l’établissement de deux certificats médicaux établis par deux psychiatres distincts.
Dans ce cas de figure, les certificats médicaux dits de 24 h et de 72 h ne peuvent donc pas être établis par le même psychiatre. En l’espèce, c’est pourtant le même médecin qui avait signé ces deux certificats, alors même que le patient avait été hospitalisé à la demande d’un tiers en urgence. Il s’agissait donc d’une irrégularité, dont le juge des libertés et de la détention (JLD) de Nanterre a considéré qu’elle faisait nécessairement grief au patient.
Il est à noter que le JLD a relevé un autre motif d’irrégularité tiré du contenu du certificat médical d’admission de la patiente. En effet, celui-ci était rigoureusement identique à un autre certificat médical d’admission rédigé par le même médecin à quatre jours d’intervalle [1].
Or, pour le JLD, « la parfaite identité des certificats fait planer un sérieux doute sur la conformité des observations consignées dans le certificat par le médecin avec le résultat de l’examen pratiqué aux urgences […] ».
La mainlevée de la mesure d’hospitalisation a été ordonnée sur le fondement de ces deux irrégularités.
[1] Confer la décision JLD Nanterre, 8 avril 2022 – Ordonnance N°22/553 commentée dans l’article intitulé : « Sus aux copiés-collés ! ».