JLD Nanterre,
11 octobre 2023
Ordonnance N°23/1997

Décision conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation suivant laquelle « l’exigence d’extériorité du médecin auteur du certificat médical initial vise à garantir le droit fondamental selon lequel nul ne peut être arbitrairement privé de liberté ».

Madame X a été hospitalisée en raison d’un péril imminent pour sa santé.

Cette procédure est prévue par l’article L 3212-1-II-2° du code de la santé publique (CSP). Elle est dérogatoire au droit commun puisqu’il n’est pas nécessaire qu’un proche demande l’hospitalisation de la personne atteinte de troubles psychiatriques et qu’un seul certificat médical peut suffire à entraîner l’hospitalisation forcée.

En raison du caractère exceptionnel de cette procédure, et afin de limiter le risque de détention arbitraire, le législateur a prévu un certain nombre de garanties parmi lesquelles figurent :

  • le fait que « Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l’établissement accueillant la personne malade […] » (article L 3212-1-II-2° du CSP) ;
  • l’obligation pour l’hôpital de prévenir un proche du patient dans les vingt-quatre heures suivant son hospitalisation (confer une décision commentée ci-avant [1]) ;
  • l’obligation de recourir à deux psychiatres distincts pour établir les certificats médicaux dits de 24 h et de 72 h (comme en matière d’hospitalisation à la demande d’un tiers en urgence, confer deux décisions commentées ci-avant [2]).

La Cour de cassation attache une importance particulière à ce que le médecin qui établit le certificat médical initial n’exerce pas dans l’établissement accueillant le patient : « 5. L’exigence d’extériorité du médecin auteur du certificat médical initial vise à garantir le droit fondamental selon lequel nul ne peut être arbitrairement privé de liberté. […] » [3].

Elle en déduit que la méconnaissance de cette exigence porte nécessairement atteinte aux droits de la personne, au sens de l’article L. 3216-1, alinéa 2, du CSP.

En conséquence, lorsqu’une hospitalisation en cas de péril imminent est décidée sur la foi d’un certificat médical établi par un médecin exerçant dans l’établissement accueillant le patient, elle est irrégulière et porte nécessairement atteinte à ses droits.

En l’espèce, le médecin qui avait établi le certificat d’admission de Madame X était un psychiatre de l’établissement. Le cabinet LUNEAU Avocat a donc soulevé cette irrégularité lors de l’audience et la mainlevée de l’hospitalisation a été ordonnée.

Deux autres moyens avaient été soulevés, ainsi que l’a mentionné le juge dans sa décision, bien qu’il n’ait pas jugé utile d’y répondre :

« A l’audience, Mme X, assistée de son conseil, déclare vouloir sortir de l’hôpital.

 Son conseil sollicite la mainlevée de la mesure au motif que le certificat d’admission a été rédigé par le docteur A, qui est médecin au sein de l’établissement et non extérieur, comme prévu par le code de la santé publique.

 Il est également soulevé que le certificat médical des 72 h a été effectué par le Docteur B, mais sous la responsabilité du Docteur C, lequel est également le rédacteur du certificat médical des 24 h, alors même que ces deux certificats doivent être rédigés par des médecins différents.

 Il est enfin soutenu que des démarches auraient pu être réalisées aux fins de recherche d’un tiers dans la mesure où, si Madame X n’a pas voulu donner les coordonnées de ses proches, il ressort de la procédure qu’elle était connue du service.

 Sur ce, il ressort en effet de la procédure que le certificat d’admission en péril imminent a été effectué par le Docteur A, praticien hospitalier aux urgences de l’hôpital Max Fourestier de Nanterre alors qu’il aurait dû être fait par un médecin extérieur à l’établissement, conformément aux dispositions de l’article L 3212-1 du code de la santé publique.

 Il convient donc, au regard de l’irrégularité constatée, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés, d’ordonner la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète ».

[1] Cour d’appel de Versailles, 2 mars 2022 – Ordonnance N°47.

[2]  JLD Nanterre, 8 avril 2022 – Ordonnance N°22/554 ;

JLD Nanterre, 11 mars 2021 – Ordonnance N°21/288.

[3] Cass Civ 1ère, 5 décembre 2019, N°19-22930.